26-04-2015

[Ex] 16 - Moïse, le Go'él du DIEU Sauveur

Exode 6:1-30 par : Père Alain Dumont
Être l'envoyé du SEIGNEUR pour racheter les Fils d'Israël de l'esclavage en Égypte n'est pas de tout repos : Moïse saura-t-il parler au peuple? Et le peuple écoutera-t-il Moïse?
Duration:17 minutes 40 secondes
Transcription du texte de la vidéo :  
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Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article
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 Bonjour,

Nous poursuivons notre lecture du livre de l’Exode, et j’espère que vous tenez le coup, parce que c’est vrai que ces vidéos sur Moïse sont nettement plus denses que celles que nous avons faites sur les Patriarches. Mais ne vous en faites pas : rappelez-vous que nous sommes ici dans les fondements, donc il est normal que ce soit plus fouillé. Si vous voulez, c’est un peu comme la construction d’une maison : la Genèse, ce sont les travaux de terrassement du terrain ; la première partie de l’Exode, ce sont les fondations ; suite de quoi, une fois les fondations bien posées, on peut bâtir la maison que constituent les livres qui composent le reste la Bible. Une maison immense ! Un palais ! Donc c’est pour ça qu’on prend le temps de fouiller un peu ce qui en constitue les fondements. Donc, surtout n’abandonnez pas à ce stade, ce serait trop dommage.

6.

Bref. Alors vous vous souvenez qu’à la fin du ch. 5 de l’Exode, la situation des UBRUS est devenue absolument intolérable, au point que Moïse lui-même est désarçonné. Il n’a plus comme recours que se tourner vers le Seigneur, qui lui répond ainsi, au début du ch. 6 : « Ce combat n’est pas ton combat, mais le combat entre Pharaon et Moi ! » Ce qui confirme l’interprétation que nous déjà donnée plusieurs fois. Et donc : Pharaon se prétend DIEU ? Eh bien : il va voir ce que cette prétention signifie. Ceci dit, il ne s’agit pas non plus d’un combat de Titans ! Encore une fois, la Bible, ce n’est pas le “Seigneur des Agneaux“. C’est PAR Moïse, c’est-à-dire PAR l’Alliance que LE SEIGNEUR passera pour manifester sa puissance ; c’est PAR Moïse qu’Il se révélera. Vous voyez : le DIEU d’Israël n’est décidément pas Zeus ou je ne sais quelle divinité païenne qui n’est jamais que la projection des fantasmes humains de toute-puissance. Non : ici, le SEIGNEUR sauve vraiment son peuple PAR Moïse ; PAR un homme auquel Il s’est attaché par l’ALLIANCE. On est ici à la base de ce qu’on appelle, en régime Chrétien, le sacrement : Moïse est le SIGNE VISIBLE du DIEU INVISIBLE, mais le signe n’est pas quantité négligeable ! Ni même un simple outil : le SIGNE vaut en tant que SIGNE, mais il n’est en même temps QUE Signe : il ne remplace pas DIEU. Dit autrement : Moïse n’est pas une “parcelle” de DIEU, ni une sorte de démiurge, non. Il est cet HOMME élu par DIEU pour agir en Alliance tellement intime avec lui qu’on nous dira après la traversée de la Mer que « le peuple eut foi en DIEU et en Moïse » Les deux ensemble ! C’est là quelque chose d’essentiel à comprendre, parce que cet HOMME par qui DIEU choisit de passer pour se manifester, voilà un caractère qui sera dévolu singulièrement au Messie, dont on voit se profiler dès maintenant la figure à travers Moïse. Ceci dit, jamais la Torah ne nous dit que Moïse est le Messie, le MaShia°h. Moïse est ce qu’on appelle un GO’EL, un terme hébreu qui vient du mot LIG'OL = « racheter ». Donc le GO’EL, c’est le RÉDEMPTEUR, c’est-à-dire, très précisément dans la Bible, le plus proche parent chargé de rétablir les droits de ses frères et de venger leurs torts. Le MaShia°h, lui, est l’Élu de DIEU ; celui sur qui a coulé l’onction d’Huile Sainte qui lui confère la ROYAUTÉ et la mission de mener toute l’histoire à son accomplissement. Pour l’instant, Moïse ne peut pas être le MaShia°h, puisque nous n’en sommes encore qu’au tout début. Mais il est bel et bien le GO’EL, le Rédempteur de son peuple au nom de HaShèM. Pour le dire autrement, le MaShia°h est nécessairement GO’EL : raison pour laquelle les Chrétiens appellent Jésus non seulement CHRIST — qui est la traduction grecque du MaShia°h —, mais aussi RÉDEMPTEURS : « Il nous a rachetés », ne cesse de dire Saint Paul. En revanche, si le MaShia°h est nécessairement un GO’EL, tout GO’EL n’est pas nécessairement le MaShia°h, et c’est le cas de Moïse.

Alors que dit HaShèM au GO’EL de son peuple, au v. 2 ? Il lui rappelle l’Alliance conclue avec ses pères. Et Il confirme que les pères ne Le connaissaient pas sous son véritable Nom ; qu’ils L’invoquaient sous celui de ÉL-SHADDAÏ, un nom qu’on retrouvera dans le Livre de Job et qui signifie quelque chose comme « Dieu des Hauteurs », ou « Dieu Tout-Puissant ». Et sous cet angle, il y a fort à parier que sous la figure de l’Horus KHENTII-KHATT-TII, un nom divin assez peu vénéré de l’Égypte, Joseph a lui-même dissimulé sa vénération de El-Shaddaï, le dieu de ses pères.

Ceci dit, dès le v. 6, le SEIGNEUR reformule à Moïse la mission qui est la sienne au sein du peuple : « Moi, le SEIGNEUR, Je vous ferai sortir de dessous les corvées de l’Égypte, je vous délivrerai de sa servitude et Je vous rachèterai par un bras étendu ! ». Voilà : vous entendez : DIEU agit désormais sous son vrai Nom, le fameux Tétragramme Sacré. Le Tétragramme, redisons-le, qui désigne DIEU en tant qu’Il n’est pas seulement le Créateur, celui qui aurait donné une chiquenaude initiale à la Création, mais bien le DIEU qui se lie intimement au projet de Délivrance, au projet de Salut du Peuple qu’Il a élu. et ce faisant, qui manifeste qu’il est véritablement le SEUL VRAI DIEU.

Seulement voilà. C’est bien beau de rappeler tout ça, mais quand vous êtes dans la douleur de l’épreuve, annoncer que HaShèM va libérer son peuple, ça passe pour de belles phrases, de belles promesses. C’est comme lorsque quelqu’un est dans la souffrance : si vous lui faites un beau discours spirituel, il vous le renvoie à la figure ! Alors que le peuple des Fils d’Israël, qui doit courber l’échine pour survivre, n’ait que faire des beaux discours de Moïse, fut-ce au nom de HaSheM, n’est pas très étonnant. C’est ce qu’on nous dit au v. 9 et au v. 12. Pourtant, à nouveau, le Seigneur encourage Moïse et Aaron : même sur ce fond d’incrédulité du peuple, il va falloir aller au turbin ! Et pour cela, pour reprendre des termes de saint Paul, il va falloir revêtir la ceinture de vérité, la cuirasse de la justice, le bouclier de la foi, le casque du Salut et l’épée de l’Esprit Saint ! Comme quoi travailler aux œuvres du SEIGNEUR est bien un combat, fut-ce au nom de l’Amour. Vous voyez ? La Torah ne nous cache rien des difficultés de la mission. C’est ce qui fait sa force : c’est très concret ! On n’est décidément pas dans les contes de Grimm ou des 1001 Nuits ! Et c’est ce qui fait que cette Torah est VRAIE : elle touche au plus concret des luttes charnelles.

C’est ici, avec le v. 13, que se conclut l’introduction à l’aventure de l’Exode. Fini les discours : place à l’action ! Et comme à chaque fois qu’une étape se conclut, on nous donne une généalogie, surtout centrée ici sur les Fils de Lévi, ce qui, à demi-mot, confirme bien leur importance capitale dans cette aventure ! Par cette généalogie, on vous dit que Moïse N’EST PAS un dieu : il est un HOMME ; un homme qui s’inscrit dans une lignée ; une lignée qui, au demeurant, n’est pas parfaite puisque NaDaR et ABiHou, les fils d’Aaron tenteront de supplanter leur propre père et de ravir son titre de Grand Prêtre… Donc ce ne sont pas des modèles, et ce n’est pas ce qu’on veut nous dire. On donne simplement la lignée de Moïse pour signifier qu’il n’est pas un inconnu dans les générations des Fils d’Israël. Remarquons encore que c’est par cette généalogie que nous connaissons les noms des parents de Aarôn et de Moïse : YoKèBèD, leur mère et AMRâM leur père, qui, rappelons-le, devait être Grand Prêtre du Sanctuaire de Joseph-Aménophis dont la charge fut transmise à Aarôn ; ce qui, au demeurant, fait de Moïse aussi un prêtre, ce qui est tout à fait dans la lignée du récit de Manéthôn auquel nous avons fait allusion la dernière fois.

Bref. Toujours est-il qu’une fois déclinée la généalogie, le ch. 6 se termine sur la difficulté de Moïse à parler, ce qui semble paradoxal pour un émissaire choisi par Le SEIGNEUR pour relayer sa Parole. Au v. 30, Moïse se dit « incirconcis des lèvres », c’est-à-dire, si vous voulez, qu’il a les lèvres “soudées”, comme si personne ne les avait tranchées. Et puisque la circoncision est le signe de l’Alliance, Moïse, ici, est en train de dire qu’il se sent complètement indigne de sa mission d’Élu. Effectivement, si la fonction d’Élu relève uniquement de l’art oratoire — ce qui semble bien être le cas en politique quand elle est annexée par les beaux parleurs —, DIEU a tout intérêt à changer son fusil d’épaule. Sauf si DIEU, précisément, est en train de nous montrer, et de montrer à Moïse, que la mission de l’Élu passe par un autre chemin. Reste à savoir lequel.

Ce que l’on sait en tous les cas, c’est que Moïse ne sait pas parler en public… Non qu’il bégayât nécessairement — encore que la chose soit possible, comme le dit la tradition rabbinique —, mais il était surtout de cette race de saints qui, lorsqu’on leur pose une question, ont besoin de réfléchir avant de parler et ne savent pas rétorquer du tac au tac. Ils font : Bbbbbb… De sorte que, comme on l’a déjà dit à d’autres occasions, Moïse aurait certainement passé pour un imbécile s’il était passé aujourd’hui à la télévision, puisque la seule chose qui intéresse les journalistes télévisés, c’est la joute oratoire ! Or les saints ne sont pas faits pour ça. Et heureusement !!! Ils ne sont pas dans la séduction, mais dans la VÉRITÉ. Ce n’est pas la même chose. Donc Moïse est en train de dire à DIEU : je ne suis pas un séducteur ; je ne sais pas manier les mots pour confondre mes détracteurs… Quand ils m’envoient une réplique, mes lèvres restent soudées… je fais Bbbbbbb… Qu’à cela ne tienne. Et on déborde ici un peu sur le ch. 7 pour écouter la réponse de DIEU : c’est Aarôn qui parlera, mais pas en son nom propre ! C’est important ! Aaron parlera, mais AU NOM DE MOÏSE ; et par Moïse, ce sera HaShèM, le Seigneur, qui parlera. Vous voyez ? Moïse est vraiment à la jointure des deux mondes : d’un côté, Aaron parle au nom de Moïse, voilà pour la partie : “hommes”, si l’on peut dire. De l’autre côté, HaShèM parle par Moïse, mais précisément pas d’abord par le jeu des mots ! Si HaShèM parle par Moïse, c’est avant tout SACRAMENTELLEMENT, CHARNELLEMENT, beaucoup plus que par la parole, puisque Moïse ne sait pas parler. C’est ce qu’on nous dira, quelques chapitres plus loin, lorsqu’on nous dira que le visage de Moïse était éclatant de la lumière divine ! Pourquoi est-ce si important ? Parce que ce qui est charnel est toujours ce qui authentifie la vérité : ce qui passe par la chair ne ment jamais ! Ou alors ce n’est plus la chair. Donc on est vraiment en train de nous dire que tout ce qui va se passer à présent ne peut pas relever du mensonge. Ça a été porté dans la chair, c’est-à-dire au plus profond et au plus vrai de ce que nos anciens ont vécu, à commencer par Moïse ! Et ce qui touche la chair de nos anciens, voilà ce que nous portons nous-mêmes dans notre propre chair. Attention donc ici à ne pas nous attacher au seul discours, comme les spectateurs passifs d’une pièce de théâtre, mais à nous attacher à la chair du récit. En nous rappelant que le SECRET de la tradition, le secret de toute tradition qui relie entre elles les générations, c’est qu’elle passe par la CHAIR. Sans quoi ce n’est qu’une idéologie, par définition désincarnée et dont le seul moyen de s’imposer est la violence. Précisément, Pharaon est dans l’idéologie, ce qu’il prouve en se faisant le bras armé de la violence. Moïse, lui, est dans la VÉRITÉ: il se fait le témoin CHARNEL, SACRAMENTEL du DIEU SAUVEUR. Contre cette sacramentalité, toute idéologie a toujours et d’avance perdu. C’est ce que Pharaon va devoir apprendre à ses dépens, et ce sera très douloureux. Non seulement pour lui, mais pour tout le peuple dont il est responsable.

C’est ce que nous verrons la prochaine fois en étudiant le ch. 7.

Je vous souhaite une bonne lecture.

Je vous remercie.

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