23-07-2017

[Nb] 9 - Désirer l'union avec YHWH

Numbers 5:1-10 par : le père Alain Dumont
Revoilà la question de l’impureté, ce qui est moins étrange qu’il n’y paraît quand on regarde le texte d’un peu près : être recensé ne suffit pas ! Encore faut-il aspirer à l’union avec YHWH et vivre selon la justice au sein du peuple des Fils d’Israël.
Duration:13 minutes 1 sec
Transcription du texte de la vidéo :
(Voir la vidéo : http://www.bible-tutoriel.com/message/nb-9-desirer-l-union-avec-yhwh.html)
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Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article
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Bonjour,

Nous ouvrons aujourd’hui le ch. 5 du Livre des Nombres, un chapitre très surprenant puisqu’après avoir magnifié la stature du Prêtre, du KoHéN en hébreu, tout à coup, on va parler des lépreux impurs, des objets à restituer et de la femme adultère, tout cela suivi au ch. 6 du NâZiR, de l’abstinent, avant qu’au ch. 7 on ne reparte sur l’organisation de la vie autour du MiShKâN. Donc ces deux chapitres forment une sorte de parenthèse dont on a du mal a priori à voir la pertinence dans la logique globale de la première partie de ce livre. Et pourtant…

Alors les v. 1 à 4 nous rappellent la législation sur ceux qui sont atteints d’infections — je vous rappelle qu’il faut oublier la traduction par « lépreux », on a vu ça à propos du livre du Lévitique —, mais ça n’est pas ça qui est important ici. Ce qu’il faut voir, dans le droit fil du ch. précédent, c’est que de même que les KoHaNîM — pluriel de KoHéN, les prêtres — ; de même que les KoHaNîM donc protègent les LéVîiM afin qu’il ne voient pas l’Arche et qu’ils ne meurent ; que les LéVîiM protègent le peuple afin qu’il ne profane pas le sanctuaire et ne meure ; eh bien le peuple lui-même protège ceux qui sont déclarés impurs afin qu’ils ne contaminent le campement des Fils d’Israël et ne meurent. Et donc là, on a comme une sorte de cercles concentriques qui marquent non pas les privilèges des instances les unes par rapport aux autres, mais bien les TUTELLES qu’exercent ces instances les unes par rapport aux autres, à commencer par les KoHaNîM. Alors évidemment, rien n’empêche d’interpréter tout ça de manière négative en lisant qu’il s’agit en fait, avec le prétexte de la sainteté, de se réserver le pouvoir, mais de telles interprétations ne tiennent pas compte de l’ensemble de la dynamique que la ToRaH tente de mettre en œuvre depuis le commencement. N’oublions pas qu’ici, on met en place l’ÂME d’un peuple dont le but est de s’élever vers YHWH, de travailler sur soi et non pas simplement de modéliser un système de castes dont les impurs seraient les intouchables façon hindoue. D’ailleurs, pourquoi est-il question de l’impureté à cet endroit ? Tout simplement parce que tous, de quelque clan que ce soit y compris les LéVîiM, et parmi eux y compris les KoHaNîM ; tous parmi ceux qui viennent d’être dénombrés peuvent contracter des impuretés. Il ne suffit donc pas d’être recensé par Moïse et ‘AHaRoN pour en être immunisé ! D’ailleurs le v. 3 parle là, très étonnamment, non pas tant de l’homme comme de la femme mais du masculin comme du féminin, ZâKhâR “aD-NeQéVâH, ‎exactement les termes employés par le récit sacerdotal de la création lorsqu’il est dit que « ‘ÈLoHîM crée ‘ADaM à son image et à sa ressemblance, ZâKhâR OuNeQéVâH, masculin et féminin Il le crée. » (Gn 1,27). Alors je vous renvoie aux vidéos concernant la création, mais en attendant, on nous dit ici que c’est de ‘ADâM qu’il s’agit ! Or ‘ADaM, ça n’est pas vous ou moi ; ‘ADaM, c’est vous ET moi, ni vous sans moi ni moi sans vous : ‘ADaM, c’est par essence un être de communion, raison pour laquelle à ce moment de l’histoire sainte, le représentant de l’ ‘ADaM porteur de l’image et de la ressemblance de YHWH, c’est le peuple des Fils d’Israël ; un peuple qui ne peut envisager son élévation vers YHWH et son union avec Lui que dans la mesure où précisément subsistent entre YHWH et son peuple cette image et cette ressemblance ! Alors entendons-nous bien : il n’y a pas identité entre ‘ADaM et YHWH — ça, c’était la prétention de Pharaon —, mais il y a bien cette image et cette ressemblance sans lesquelles aucune union ne serait envisageable. Or ce que l’impureté vient altérer, c’est cette image et cette ressemblance entre ‘ADaM et YHWH, et donc la possibilité de leur union, rendant vaine toute offrande dans le Sanctuaire. Dit autrement, si l’impureté vient porter atteinte à ce projet nuptial, c’est qu’elle atteint tout le peuple et non pas seulement les individus. Dès lors il faut en préserver le campement pour que le projet nuptial ne s’effondre pas, ce qui ne signifie pas que le renvoi des impurs consiste en une excommunication ! Le renvoi permet à toute la communauté de poursuivre le travail d’élévation, mais une élévation dont on a bien dit par ailleurs qu’elle entraîne TOUT LE PEUPLE, y compris les impurs, dans la sainteté. Du coup, si l’impur ne peut pas œuvrer activement à cette élévation du peuple, ça ne signifie pas qu’il soit exclu de cette élévation à laquelle travaillent les offrandes et qui concerne TOUT LE PEUPLE comme un seul ‘ADâM.

Les v. 5 à 10 abordent quant à eux la question du délit, le fameux âShâM qui demande une offrande pour les délits dont le fautif est responsable. Ici, très clairement, il s’agit d’une reprise condensée du Lévitique : « Lorsqu’une âme — une NèPhèSh — manque et fraude d’une fraude envers YHWH, soit qu’elle mente à son compatriote au sujet d’un dépôt, d’une chose confiée en main propre ou d’une rapine, soit qu’il ait extorqué son compatriote, ou si, ayant trouvé un objet perdu, elle ment à son sujet en prêtant un faux serment ; en tout ce qu’un ‘ADâM fait pour manquer, quand elle — la NèPhèSh — manquera, elle sera coupable d’un délit. Qu’elle restitue la rapine qu’elle a rapinée ou l’extorsion qu’elle a extorquée, le dépôt déposé chez autrui, l’objet perdu qu’elle a trouvé ou tout au sujet de quoi elle a prêté un faux serment. Elle le restituera en son entier en y ajoutant un cinquième et elle le donnera le jour de son délit — c’est-à-dire le jour où cette âme viendra offrir l’offrande pour les délits. » (Lv 5,21-24) Or cette fois, il ne s’agit plus du masculin comme du féminin, ZâKhâR “aD-NeQéVâH, mais bien de l’homme ou de la femme, ‘îSh Ou-‘îShâH, c’est-à-dire que là, il est question du rapport horizontal, pour ainsi dire ; ou du rapport fraternel entre compatriotes, tous sexes confondus. Alors on se demande : « C’est quoi le rapport avec ce qui précède ? » Eh bien le rapport, ce sont les deux Tables de la ToRaH qui sont dans l’Arche ! D’une part la première table pose les Paroles concernant YHWH — d’où ZâKhâR “aD-NeQéVâH : il s’agit de ne pas perdre cette ressemblance pour ne pas entraver le mouvement d’élévation vers YHWH ; et d’autre part la seconde table qui pose les Paroles concernant les rapports entre compatriotes, homme ou femme, ‘îSh Ou-‘îShâH : « Tu ne voleras pas, tu ne témoigneras pas à faux contre ton compatriote, tu ne convoiteras pas. » (Ex 20,15-17). Dit autrement, c’est bien beau de tout organiser pour garder purs le Sanctuaire ou le peuple, mais encore faut-il que ce qu’on met au cœur de cette communauté, c’est-à-dire l’Arche contenant les Tables de la ToRaH, soit vécu dans la CHAIR ! Dans le concret de la vie en communauté ! Sans quoi on tombe dans un formalisme insupportable et surtout complètement stérile, et les LéVîiM ne servent à rien, les KoHaNîM ne servent à rien, et le peuple perd son âme ! C’est déjà, d’une certaine manière, l’application des appels prophétiques : « Je vous prendrai du milieu des nations, je vous rassemblerai de tous les pays, je vous conduirai dans votre terre. Je répandrai sur vous une eau pure, et vous serez purifiés ; de toutes vos souillures, de toutes vos idoles, je vous purifierai. Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau. J’ôterai de votre chair le cœur de pierre, je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon esprit, je ferai que vous marchiez selon mes décrets, que vous gardiez mes préceptes et que vous les fassiez. Vous habiterez le pays que j’ai donné à vos pères : vous, vous serez mon peuple, et moi, je serai votre Dieu. » (Ez 36,24-28) Autant de paroles qui ont été dites par Ézéchiel au moment de l’Exil mais qui résument parfaitement les v. 1 à 10 de notre chapitre, au moment où précisément il s’agit de se préparer pour prendre la route vers la Terre de la Promesse ! Comme quoi vous voyez : Exil et Exode = même combat ! D’accord : l’Arche est au milieu de vous, mais ça n’est pas de la magie ! Vivez ce qu’elles disent ! Portez dans vos cœurs de CHAIR ce qui est gravé sur les Tables de Pierre ! Il faut que les Tables que contient l’Arche et sur lesquelles sont chargés de veiller KoHaNîM et LéVîiM constituent la MARCHE INTÉRIEURE de tout le peuple : « Je ferai que vous MARCHIEZ selon mes décrets ! » C’est à nouveau le LeKh LeKhaH, « Va vers toi » lancé par YHWH à ‘AVeRâHâM au moment pour lui de prendre la route, au tout début de l’histoire sainte ! Du coup, le peuple des Fils d’Israël est bel et bien le peuple des Fils de ‘AVeRâHâM, monté sur ses épaules pour voir plus loin, toujours plus loin ! Pour lever les yeux jusque vers l’horizon de YHWH qui est à l’intérieur de l’homme — et non pas dans les extases célestes !

Reste que pour ça, il faut se mettre en marche concrètement, charnellement : c’est ce qu’on a dès après le péché d’Adam et Ève : DIEU ne les punit pas, Il les met en route ! C’est ce qu’on a avec Abraham, avec Jacob, avec Moïse. Et donc c’est ce qu’on a avec le peuple : dès qu’il se croit installé, il cesse de marcher vers Lui, il cesse d’agir à la mesure de sa vocation, de sa mission, et YHWH est obligé de le relancer sur le chemin : c’est l’Exil ! D’ailleurs, l’Église se comprend de la même manière : elle-même n’a pas de territoire ! Elle est constamment sur les chemins, sur les routes, à la suite de son fondateur, puisque Jésus était lui-même un prédicateur itinérant ! Toute la Bible est une Route, un chemin sur lequel il s’agit de se lancer, de s’élancer. C’est encore Dt 30 : « Je mets devant toi la vie et la mort, choisis la vie ! » Dit autrement, vis en toi ce qui est inscrit dans les Dix Paroles. Après, peu importe que l’Arche soit au milieu de vous ou non. Quand elle aura définitivement disparu matériellement du Temple de Jérusalem, au début de l’Exil, qu’importe, si elle est inscrite dans les cœurs ? Sauf qu’il faut bien commencer à un instant T, et ma foi, voilà : il est là, l’instant T, à ce stade du Livre du MiDeBaR où la ToRaH commence à germer dans le cœur d’un peuple encore aride, mais c’est pour que peu à peu fleurisse ce MiDeBaR !

Du coup, la suite ne pose pas de problème logique : la question de la femme adultère reste dans le registre de la seconde Table de la ToRaH — « Tu ne commettras pas l’adultère ! », mais nous verrons ça la prochaine fois parce que le texte n’est pas si simple. En attendant, je vous souhaite une bonne lecture de ces 10 premiers versets du ch. 5 du livre du MiDeBaR ! Je vous remercie. 
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