24-09-2017

[Nb] 25 - Une chute pour un relèvement

Numbers 14:19-45 par : le père Alain Dumont
YHWH pardonne à son peuple sa trahison. Mais pardonner ne veut pas dire passer l’éponge comme si rien ne s’était passé. Pardonner signifie décider de reprendre la route avec le peuple pour lui permettre de se purifier et de se préparer, le temps qu’il faudra, à monter en KaNa“aN pour y vivre et non pour y mourir. Le peuple entendra-t-il ce message d’espérance à travers cet épisode redoutable et malheureux ?
Duration:26 minutes 38 secondes
Transcription du texte de la vidéo :
(Voir la vidéo : http://www.bible-tutoriel.com/message/nb-25-une-chute-pour-un-relevement.html?mode=watch)
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Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article
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Bonjour,

Nous poursuivons notre lecture du ch. 14 du livre des Nombres. Nous nous étions arrêtés la dernière fois sur cette question : que va-t-il se passer après que Moïse, le JUSTE, ait intercédé pour Israël, se soit présenté comme cet ARBRE de fidélité grâce auquel l’Alliance ne s’est pas rompue avec YHWH ? Eh bien YHWH proclame solennellement : « SâLaH.eTTî KiDeVâRéKhâ », « Je pardonne selon TA parole ! » Vous vous rendez compte ? YHWH ne veut pas pardonner par la seule vertu de sa mansuétude, fut-elle infinie, mais par la vertu de la parole du JUSTE ! YHWH se SOUMET À LA PAROLE DU JUSTE ! C’est absolument prodigieux et tellement inattendu ! On se représente tellement toujours DIEU au-dessus des lois qu’Il édicte, et là, le voilà qui rentre dans le cadre que Lui-même a mis en place pour son peuple ! Certes, YHWH est celui qui convoque Israël à écouter, mais c’est parce que Lui, YHWH, le premier, se met à l’ÉCOUTE de son peuple à travers les JUSTES qu’il engendre. Et là, on comprend peut-être mieux l’importance du YOM KiPOuR où le Grand-Prêtre se présente devant YHWH dans le Sanctuaire pour demander pardon dans la ligne de Moïse ! S’appuie-t-il alors sur les mérites de Moïse ou sur les siens ? Les deux vraisemblablement, mais surtout sur ceux du JUSTE Moïse dont il est le représentant institué.

Les JUSTES de l’AT, ce sont les SAINTS de l’Église, c’est la même chose. De ce point de vue, l’Église orthodoxe est moins timorée que les autres et n’a pas peur de célébrer Saint Abraham, Saint Isaac, Saint Jacob, saint Moïse, saint David, saint Isaïe, saint Jérémie etc. ! Ces justes sont saints parce qu’en Christ, la rencontre nuptiale pour laquelle ils ont tant œuvré en tant que JUSTES s’est accomplie en Jésus. Après Jésus, les Noces éternelles ne sont plus à venir : elles ont lieu maintenant et tous les martyrs, les témoins de toutes les générations assoiffés de s’unir à Dieu y participent. C’est ce qui fait la réalité de l’Église comprise non pas comme une simple institution — qu’elle est au demeurant — mais comme l’assemblée de ceux qui sont sauvés par cette rencontre divino-humaine à laquelle ils se sont préparés ; d’abord les Fils d’Israël puis les païens qui ont mis leur foi en YéHoShoua“ d’une manière ou d’une autre, soit qu’ils l’aient reconnu nommément, soit qu’ils aient à tout le moins vécu comme des JUSTES à qui le Roi du ciel dira : « Ce que vous avez fait à ces petits qui sont les miens, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25,40).

Donc, pour en rester à notre texte, YHWH pardonne, ce qui est l’annonce que, grâce au JUSTE Moïse, l’Alliance n’est pas rompue malgré la trahison des Fils d’Israël. Alors attention encore une fois : quel courage, quelle humilité de la part du peuple des Fils d’Israël d’avoir jeté leur confession à la face du monde ! Parce que c’est de ça dont il s’agit. Ils sont en train de nous dire : voilà ce que nous avons fait et nous en avons payé le prix mérité : ne faites pas la même chose que nous !!! Quelle grandeur ! Quelle noblesse ! Comment ne pas être reconnaissant à ce peuple de nous avoir légué un tel trésor ? Vous pouvez toujours chercher dans le Coran, vous n’y trouverez JAMAIS rien de tel !

Bref. Toujours est-il que pardonner, comme l’exprimait fort bien le v. 18, ne signifie pas passer l’éponge comme si rien ne s’était passé. Les v. 20 à 23 sont terribles : YHWH agrée la requête des Fils d’Israël et leur accorde cela même qu’ils ont demandé, à savoir prendre un chemin de retour vers l’Égypte ! Non pas jusqu’en Égypte, mais à tout le moins « en direction de la Mer des Roseaux » ! Ils n’ont pas voulu la terre ? Ils ne l’auront pas ! Quelle tragédie ! Pour autant, attention : YHWH n’est pas ici le méchant de l’histoire ! Nous apprenons simplement que toute décision a ses conséquences et que YHWH prend ses enfants véritablement au sérieux. Quant au nombre 10 qui comptabilise les fois où les Fils d’Israël se sont détournés de YHWH d’une manière ou d’une autre, ce nombre symbolise à travers les doigts des deux mains, l’agir humain : c’est une manière de dire que ce mépris, cette mise à l’épreuve de YHWH LEUR incombe pleinement de par leur responsabilité face à leurs décisions en tant qu’hommes.

Intéressante aussi est la note concernant KâLéV au v. 24. Il était censé aller explorer KaNa“aN au nom de la tribu de Juda, mais ce ne sera pas la tribu de Juda qui montera à HèVeRON : juste son clan familial, pourrait-on dire. Et là, on a une trace sans doute ancienne d’un clan dont la mémoire faisait remonter les racines jusqu’à Joseph — en gros, toutes les traditions qui le concernent sont amalgamées autour de celles de la descendance de Joseph — mais indépendante pourtant d’une entrée en Terre Sainte par le Jourdain. Ce qui veut dire qu’on peut considérer que la conquête de la terre s’est faite en plusieurs vagues, et c’est donc ça qu’on nous raconte ici. Ceci dit, par quelque bout qu’on rentre en terre de KaNa“aN, c’est toujours par la fidélité à YHWH que la chose est possible et c’est ce que nous dit le v. 24 : au moment où l’esprit du peuple — je vous rappelle que l’esprit, le ROuaH., est ce par quoi l’homme entre en relation avec YHWH. L’âme, la NèPhèSh, est ce par quoi l’homme entre relation avec soi et le corps, BâSsâR, ce par quoi l’homme est en relation avec l’autre. Et le tout, inscrit dans le temps, dans une histoire, compose cette fameuse CHAIR dont je ne cesse de vous parler au fil des vidéos. Donc au moment où l’esprit du peuple se détourne de YHWH, celui de KâLéV Lui reste fidèle qui se voit autorisé à entrer dans la terre de la promesse. Alors on pourrait se dire que Josué, YéHoShoua“, lui aussi a été fidèle : oui, mais lui aura cet honneur de faire entrer le peuple plus tard. Tout le monde n’a pas la même mission dans l’histoire et la tradition retient que YéHoShoua“ est celui qui est resté auprès de Moïse jusqu’à la mort de celui-ci avant de prendre sa relève à la tête de la Communauté. Toujours est-il que le peuple, quant à lui, retourne donc sur ses pas, selon précisément ce qu’il a revendiqué. On ne dit pas qu’ils sont désolés, ni qu’ils pleurent. On ne sait pas dans quel état d’âme ils vivent ce retournement, mais quoi qu’il en soit, on voit bien le drame qui se joue : refuser d’entrer en Terre Promise, c’est signer le refus de croire YHWH et c’est donc refuser de sortir d’Égypte ! C’est préférer l’esclavage à la liberté ; c’est mettre YHWH à l’épreuve et donc son Alliance, et donc l’élection, et donc la ToRaH avec tout le cortège d’exigences qu’elle porte en elle ! Voilà qui illumine les raisons de l’Exil à Babylone qui est l’époque de rédaction du Livre : l’Exil est du même ordre que ce qui s’est passé au moment d’entrer sur la Terre à ce moment du Livre du MiDeBaR : si YHWH a permis la déportation, que ce soit à Babylone ou en Égypte, c’est bien parce que le peuple s’est détourné de Lui !

À partir du v. 26, on retrouve le rédacteur sacerdotal : on l’avait quitté au v. 6. D’ailleurs, vous pouvez faire l’expérience : on passe sans difficulté du v. 6 au v. 26 qui sont contigus et c’est la raison pour laquelle on retrouve ‘AHaRoN et la communauté à côté de Moïse alors qu’ils ont comme disparu entre les v. 7 et 25. Seulement cette fois, YHWH dénonce littéralement la « communauté du mal » définie comme la communauté qui, certes se révolte contre la volonté de YHWH, mais surtout comme la communauté qui a été incapable de choisir le bien, c’est-à-dire la Vie — pensons encore et toujours à Dt 30 qui prend ici tout son relief : quand YHWH exhortera les descendants de la nouvelle génération à choisir la Vie, ce sera sur fond du choix contraire qu’ont fait leurs pères, et non pas une joliette exhortation morale. La « communauté du mal » n’est pas une « méchante communauté » comme on traduit parfois, encore moins une communauté « perverse » : c’est une communauté qui confond liberté et autodétermination, avec une indépendance d’avec YHWH.

Tout ça a commencé avec Myriam, au ch. 12, et a proliféré dans le peuple qui se prend à relativiser l’exigence de l’Alliance au regard de son bien propre, de ce qu’il croit reconnaître comme un bien pour lui, quitte à s’y enfermer comme dans un lieu de mort… « Moi aussi je suis prophète ! », avait revendiqué Myriam. « Nous sommes libres de nous autodéterminer en choisissant un autre DIEU ! », dit la communauté. On retrouvera exactement cette problématique avec l’avènement de la pensée des Lumières ! On pourrait presque parler ici d’une sorte d’addiction au désert au sens où quand on est dans une addiction, on sait très bien, même confusément, qu’elle est un mal puisqu’elle mène assurément à la mort ; mais on refuse d’en sortir ; on ne s’en sent pas capable parce que la lutte nécessaire pour s’en dégager nous paraît être un combat perdu d’avance. C’est la mentalité du looser… Alors on murmure contre ceux qui croient possible une victoire, jusqu’à envisager de les lapider quand ils font mine de faire du forcing. Bref : on ne croit plus qu’un salut soit possible, on ne croit plus à la joie de la liberté et la volonté devient dès lors incapable de s’y porter et se met donc en demeure de chercher d’autres chemins.

Alors ? Alors il faut savoir entendre les mots durs des v. 28 à 35, mais surtout il faut savoir les lire ! Et c’est là qu’on s’aperçoit de l’importance de connaître un peu les règles de composition des textes bibliques. Regardons bien : le v. 35 reprend l’expression Ha“éDâH HâRâ“âH, la « communauté du mal » du v. 26, ce qui suggère que ces deux versets 26 et 35 forment une inclusion qui nous dit que cet ensemble forme une unité de sens. Les v. 26 et 35 constituent comme deux appels à la sagesse : « Écoutez, vous qui vous êtes constitués en communauté du mal ! » Or on se souvient, dans ce genre de construction littéraire, tout appel ouvre sur une épreuve, c’est-à-dire un passage à franchir. De ce point de vue, le v. 29 décrit les cadavres qui tombent dans le désert — là je vous passe les commentaires funèbres des rabbins qui nous expliquent que les gens creusaient leur lit chaque soir dans le sable au cas où ils mourraient dans la nuit : c’est-à-dire qu’ils creusaient chaque jour leur propre tombe ! Charmant ! Sauf que la Bible, et en particulier la ToRaH, ne s’abaisse pas à de telles descriptions macabres, heureusement ! Ce qui importe, c’est qu’on va retrouver ces cadavres au v. 32 : ils constituent l’élément essentiel de l’épreuve associée au fait que cette génération n’entrera pas sur la Terre : c’est aux v. 30, 33 et 34. Du coup, le regard aguerri se porte sur le v. 31 qui est au centre de cette unité, et là, c’est une promesse qui est donnée : « Vos marmots dont vous avez dit qu’ils deviendraient un butin — un butin d’esclaves pour les ennemis —, ce sont eux que Je ferai entrer : eux connaîtront la terre que vous avez refusée ! » (Nb 14,31) Les marmots, TaPh en hébreu, de la racine TâPhaPh qui veut dire « dandiner » comme de petits enfants au pas mal assuré. Du coup, ce v. 31 est un verset d’espérance au milieu de l’épreuve, et c’est ça qu’il faut garder comme le nœud de ce passage : oui, cette génération va mourir au désert, mais ça ne veut pas dire que l’espérance est perdue ! Ça ne veut surtout pas dire que le peuple s’anéantira dans le désert ! Rappelons-nous toujours que le peuple, dans la Bible, se comprend comme l’ensemble de toutes les générations depuis Abraham, de sorte que ce que je vis aujourd’hui, c’est au nom d’Abraham qui a porté en lui toute la promesse inscrite dans sa descendance ! Donc le peuple entrera, c’est certain puisque YHWH tient parole. Mais c’est vrai que ce sera pour la génération à venir. L’épreuve est là, mais grosse d’une promesse qui adviendra.

À nouveau, comprenons bien l’importance de ce passage quand il retentit aux oreilles des générations qui reviennent d’Exil ! Si YHWH nous a envoyés à Babylone, c’est que nos pères ont fauté ! Mais voilà que nous, leurs marmots, nous sommes à Jérusalem aujourd’hui ! Et là on comprend mieux pourquoi, en entendant la proclamation de ces récits, le peuple pleure d’émotion, c’est dans le livre de Néhémie : « “ÉZeRâ‘ — Esdras —, le prêtre scribe, et les LéVîiM qui instruisaient le peuple dirent à tout le peuple : “Ce jour est consacré à YHWH votre ‘ÈLoHîM ! Ne soyez pas dans le deuil et ne pleurez pas !” Car tout le peuple pleurait en écoutant les paroles de la ToRaH. » (Né 8,9) Vraiment, même s’il faut du temps à cause de la dureté de cœur des pécheurs — mais YHWH est patient ! Heureusement ! — ; même s’il faut du temps donc, YHWH tient parole, sachant que chaque génération est solidaire de celles qui l’ont précédée et de celles qui lui succèderont. Ce que les pères ont espéré sans pouvoir le voir, les fils le voient et par eux, c’est TOUT le peuple, toutes générations confondues, qui entre en définitive sur la Terre : « Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez ! Car Je vous le dis : beaucoup de prophètes et de rois ont désiré voir ce que vous voyez et ne l'ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l'ont pas entendu. » (Lc 10,23-24), dira Jésus à son propos : c’est exactement la même dynamique : ce que vous voyez, vous le donnez à voir aux rois et aux prophètes qui l’ont attendu avec tant de ferveur ! Vous n’êtes pas privilégiés : vous êtes les fils de vos pères avec qui vous ne faites qu’un seul et même peuple ; et vous leur devez de reconnaître ce qu’ils ont eux-mêmes tant espéré ! Mais encore une fois, non sans traverser, pour chaque génération, l’épreuve purifiante que le manquement impose pour amener le peuple à la véritable liberté à laquelle convoque l’élection.

Restent les explorateurs qui ont entraîné les murmures et la trahison du peuple et là, la sanction est immédiate : ils s’effondrent dans la mort. Bing. Pourquoi ? La logique est celle-ci : ils sont entrés dans le pays avec le même cœur de prostitution que leurs congénères, comme dit le v. 33 — rappelons-nous que l’âme du culte est la relation nuptiale avec YHWH ; donc tout choix d’aller derrière d’autres chefs, d’autres dieux, d’autres amants dira le prophète Osée, est assimilé à de la prostitution — ; donc cette génération reçoit la sanction promise à tout Fils d’Israël de cette génération qui serait suffisamment téméraire pour entrer, comme on va d’ailleurs le voir dans les v. 39 à 45. Ceux qui sont entrés avec la foi au cœur, comme KâLéV et YéHOShou”a, eux, ont la vie ; les autres sont sanctionnés comme le prévoit la ToRaH à propos de l’adultère. Quelque part, les 40 années au désert font office de purgatoire : pour que le peuple infidèle ne meure pas en entrant dans la terre, YHWH dans sa Miséricorde retarde la montée de son peuple ; mais comprenons bien : c’est justement POUR QU’ILS PUISSENT ENTRER sans en mourir ! Là est le réalisme du pardon qui se refuse à donner ce qui est promis en sachant que ce don entraînera la mort de ceux qui n’y sont pas préparés. 40, c’est toujours le chiffre d’une maturation. Ceci dit, je vous laisse imaginer le désarroi de Moïse quand bien même le texte soit silencieux à ce sujet !

Alors terminons ce chapitre. Le v. 39 nous dit que les Fils d’Israël ont compris qu’ils avaient fait le mauvais choix, celui du mal, de la mort, d’où le deuil de tout le peuple à l’instar du deuil après l’épisode malheureux du Taurillon d’or, en Ex 33, v. 4. Ce qui est terrible, c’est que certains vont tout de même tenter de monter « sur le sommet de la montagne ». Quelle montagne ? Celle de Jérusalem, disent les rabbins : LE LIEU par excellence, HaMaKoM comme dit le v. 40, où résidera le futur Temple, donc où résidera YHWH au milieu de son peuple sédentarisé. Pourquoi forcent-ils l’interdiction de YHWH ? Pour pouvoir demander pardon disent les rabbins ; pour pouvoir offrir les offrandes pour le délit, ou vivre le YOM KiPOuR semble suggérer la fin du verset ! Mais voilà que l’Arche ne bouge pas, ni Moïse, et donc YHWH ne donne pas la victoire à Israël qui se fait battre à plates coutures contre les nations qui s’engagent dans le combat contre Israël ! Comprenons bien qu’on reste dans la dynamique de ce qui s’est passé pour NaDaV et AViHOu : ok, tu as compris que YHWH voulait que tu t’élèves — ça n’est pas pour rien que le texte parle de la montagne —, mais tu ne supporteras pas cette élévation parce que tu n’es pas prêt : donc si tu montes en force, tu en meurs ! Non pas cette fois par le feu de YHWH mais par le bras armé de ses ennemis qui n’ont montré cette fois aucune agressivité active ! Ce sont les Fils d’Israël qui sont allés tout seuls de jeter dans la gueule du loup ! On a sans doute là la mémoire de tentatives malheureuse d’entrée en Terre Promise de la part de certains groupes affiliés à Moïse. Le rédacteur n’a pas voulu le taire et il faut lui en savoir gré.

Mais pour en revenir à la portée de notre récit, j’aime assez personnellement cette interprétation des rabbins quand ils disent, à propos du dernier verset du ch. 14 : ayant refusé d’obéir à l’appel de YHWH de MONTER en KaNa“aN, Israël s’est EFFONDRÉ plus bas que tous les peuples de la terre, raison pour laquelle, dit le v. 45, l’Amalécite et le Cananéen durent DESCENDRE pour l’affronter. Ça résume assez bien la portée spirituelle de toute cette tragédie. Ceci dit, ça ne veut pas dire que tout soit fini, au contraire ! Il va falloir se ressaisir et surtout se RELEVER : c’est tout le sens de la vision d’Ézéchiel, au moment de l’Exil, qui prend ici son relief alors qu’on vient de nous dire que les cadavres de cette génération joncheront le désert pendant 40 ans : « La main de YHWH se posa sur moi, par son esprit il m’emporta et me déposa au milieu d’une vallée ; elle était pleine d’ossements. Il me fit circuler parmi eux ; le sol de la vallée en était couvert, et ils étaient tout à fait desséchés. Alors YHWH me parla ainsi : « Fils d’homme, ces ossements peuvent-ils revivre ? » Je lui répondis : « Mon Seigneur YHWH, c’est toi qui le sais ! » Il me dit alors : « Prophétise sur ces ossements. Tu leur diras : Ossements desséchés, écoutez la parole de YHWH : Ainsi parle Mon Seigneur YHWH à ces ossements : Je vais faire entrer en vous l’esprit, et vous vivrez. Je vais mettre sur vous des nerfs, vous couvrir de chair, et vous revêtir de peau ; je vous donnerai l’esprit, et vous vivrez. Alors vous saurez que Je suis YHWH. »
Je prophétisai, comme j’en avais reçu l’ordre. Pendant que je prophétisais, il y eut un bruit, puis une violente secousse, et les ossements se rapprochèrent les uns des autres. Je vis qu’ils se couvraient de nerfs, la chair repoussait, la peau les recouvrait, mais il n’y avait pas d’esprit en eux. YHWH me dit alors : « Adresse une prophétie à l’esprit, prophétise, fils d’homme. Dis à l’esprit : Ainsi parle Mon Seigneur YHWH : Viens des quatre vents, esprit ! Souffle sur ces morts, et qu’ils vivent ! » Je prophétisai, comme il m’en avait donné l’ordre, et l’esprit entra en eux ; ils revinrent à la vie, et ils se dressèrent sur leurs pieds : c’était une armée immense ! Puis YHWH me dit : « Fils d’homme, ces ossements, c’est toute la maison d’Israël. Car ils disent : “Nos ossements sont desséchés, notre espérance est détruite, nous sommes perdus !” C’est pourquoi, prophétise. Tu leur diras : Ainsi parle Mon Seigneur YHWH : Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter, ô mon peuple, et je vous ramènerai sur la terre d’Israël. Vous saurez que Je suis YHWH, quand j’ouvrirai vos tombeaux et vous en ferai remonter, ô mon peuple ! Je mettrai en vous mon esprit, et vous vivrez ; je vous donnerai le repos sur votre terre. Alors vous saurez que Je suis YHWH : j’ai parlé et je le ferai – oracle du Seigneur. »
(Ez 37,1-14)

Voilà. Au terme de ce ch. 14, je crois qu’il était important de laisser la parole à cet immense prophète que fut le prêtre Ézéchiel. Au milieu de ce désastre, il exprime toute l’espérance qui reste rivée au cœur de la Communauté des Fils d’Israël. Je vous souhaite une bonne lecture de cette seconde partie du ch. 14. Nous verrons la suite la prochaine fois. Je vous remercie.
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