19-12-2014

[Gn] 22 - le songe de Jacob

Genèse 28 par : Père Alain Dumont
Jacob par sur la route de l'Exil. DIEU se révèle à lui dans un songe et Jacob fait vœu de le servir.
Rubrique :Jacob
Duration:14 minutes 40 secondes
Transcription du texte de la vidéo :

(Voir la vidéo : http://www.bible-tutoriel.com/le-songe-de-jacob.html )

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Pour une citation, mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutorielhttp://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article
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Bonjour,

Jacob a volé le droit d’aînesse de son frère jumeau Esaü l’a supplanté une seconde fois en prenant la bénédiction paternelle par laquelle se transmet la promesse. Esaü l’a donc pris en haine et cherche à se venger en le tuant. Il faut faire quelque chose, et ce sont donc les parents qui prennent les grandes décisions : Jacob doit partir tant que la fureur de son frère brûle contre lui.

Alors on trouve une excuse, pour ne pas perdre la face : puisque Jacob porte la promesse, il ne peut pas prendre une femme du pays, il doit retourner en Harân, dans le Mitanni et prendre une fille de la descendance de Labân, le frère de Rebecca, fils de Bétouél, lui-même fils de Nahor, le frère d’Abraham. On reste dans le cercle restreint des racines du clan : Jacob est envoyé épouser une cousine germaine, alors qu’Esaü, lui,  épousera des filles du pays de Canaan, ainsi qu’une fille d’Ismaël qui n’est toujours pas mort non plus, il a 114 ans.

Et voilà Jacob parti, non sans avoir reçu à nouveau une bénédiction spéciale de son père au Nom du DIEU Tout Puissant, El-Shaddaï, le DIEU des lieux élevés.

Vous voyez : c’est encore l’Élu qui part en Exil. C’est là le grand mystère de l’Exil. Fondamentalement, l’Élu n’a pas d’endroit où reposer la tête, et c’est à ça qu’on le reconnaît. Depuis le début, puisque la première parole de DIEU pour Abraham, vous vous souvenez, est justement : « Quitte ta terre ! »

Pourquoi l’Élu doit partir en Exil ? Parce que je ne mets pas la main sur l’élection. L’élection, pas plus que la bénédiction, n’est un pouvoir. Un peu lorsqu’un un héritier d’une grande fortune est envoyé par son père pour commencer à travailler au bas de l’échelle.

Ashréï ! En marche ! Une interjection qui retentit 45 fois dans la Bible, comme dans le Psaume 1 qui commence précisément par cet appel, qui court sur tout le psautier ! La Bible de la Septante, en grec, l’a traduit par Bienheureux !, c’est-à-dire le béni !!! Le béni, c’est celui qui se met en marche sur une injonction de DIEU.

Or ce que Jacob va apprendre, et qui va le marquer profondément, c’est que DIEU est justement là où il ne l’attendait pas.  Cela va revenir plusieurs fois dans le récit de son histoire : « DIEU était là et je ne le savais pas !!! »

Alors voilà : Jacob quitte Beershéva et monte dans le Nord, vers le Mitanni. Et dès la première nuit, il va faire une expérience saisissante. Le soir, après le couché du Soleil, il n’est plus question d’avancer. Il est arrivé « en un lieu », dans le LIEU, BaMakom : le Mont Moriah, dira le Talmud.

Il trouve une pierre et s’en sert d’oreiller. Comme quoi il apprend la vie à la dure, c’est le cas de le dire !!!

Et là, il a un « songe ». En particulier dans le Moyen Orient antique, le songe est le lieu par excellence d’une communication divine. Pourquoi ? Parce que le songe paraît dans le sommeil, qui est un poste avancé de la mort… donc un poste avancé de DIEU. Aujourd’hui où nous avons tout rationalisé, nous pensons que ce ne sont que des fariboles, mais pour des hommes religieux, le songe reste un lieu étonnant où bien des chrétiens, aujourd’hui encore, font des expériences de la présence de DIEU étonnante.

Il faut lire le texte : Gn 28,12-15.

Sur cet escalier, la Kabbale et le Zohar vont complètement fantasmer : elle représente les degrés de la sagesse qui achemine l’âme vers la connaissance de DIEU, etc.

Il vaut mieux imaginer ici un escalier de ziggurat. Jacob n’en a jamais vu, mais les pères, oui. Et à une époque où l’on raconte beaucoup à travers la mémoire des pères, il n’est pas impensable que l’imagination de Jacob ait été imprégnée depuis la plus tendre enfance. La ziggurat étaient ces grandes tours élevées par les Mésopotamiens pour honorer leurs dieux. D’immenses constructions entièrement pleines : on n’y habite pas, comme pour les pyramide de Tehotihuacan, au Mexique. On y offre sans doute des sacrifices. Bref, c’est un lieu élevé, parce que DIEU est élevé : c’est le El-Shaddaï, le DIEU des Monts.

Mais le plus surprenant, ce sont les anges qui montent et qui descendent. Pourquoi est-ce surprenant ? Parce qu’à cette époque, il n’est pas envisageable qu’une relation puisse exister entre le monde divin et celui des hommes. La seule réalité qui puisse les mettre en relation, c’est éventuellement le sacrifice, dont la fumée s’élève vers le ciel et pour aller toucher les narines divines, mais pas plus. Si vous prenez le panthéon grec, par exemple, il n’est pas question que les dieux interviennent dans l’histoire des hommes qui doivent se débrouille sans eux. Et heureusement, parce que chaque fois qu’un dieu a des velléités de descendre, souvent parce qu’il tombe amoureux, c’est toujours catastrophique, parce que l’ordre du Cosmos est rompu…

Bref, que des anges montent et descendent est une expérience vraiment originale qui va nourrir toute la mémoire du peuple de DIEU issu de Jacob. Il y a un lien vivant entre le ciel et la terre ! Les anges représentent les divinités des nations, mais Jacob, lui, ne dépend pas d’eux : il dépend uniquement de DIEU, et c’est ce qui fait qu’il est l’Élu ! C’est pourquoi , la promesse lui est redonnée par DIEU : une VOIX retentit : lire les v.13-15.

Toujours le même thème : la bénédiction de tous par la bénédiction d’un unique. Jacob, là, est vraiment FILS D’ABRAHAM, Fils de la Promesse (et non pas le « fils promis » !). Vous voyez ? C’est comme si Isaac était un entre-deux : Jacob est relié directement à Abraham. Il quitte la maison familiale et DIEU lui parle ! Comme son grand-père.

Alors il se réveille, il fait jour, et il se dit : « DIEU était dans ce lieu-ci, et MOI, je ne le savais pas »

Très fort : : « Adonaï bamakov mehazé, ve anokhi, lo yada”éti ! » MOI, c’est le Titre de DIEU ! Qui précède, en quelque sorte, le JE SUIS de Moïse. On retrouve ce titre quand DIEU parle à Abraham en Gn 15,1 ; à Isaac, en Gn 26,24 ; Quand il donne le décalogue (Ex 20,2) ; etc.

Et il poursuit : « Ce lieu est terrible ! Ce n’est rien de moins qu’une Maison de DIEU (= le nom du Temple), et c’est la Porte du Ciel ! » Alors il l’appelle BEHT-EL : Maison de DIEU. En fait, le Talmud dira : le nom de la ville est Louz, mais c’est l’ancien nom de Jérusalem. Il y a plusieurs lieux qui se nomment Bethel. Mais ce nom revient en préséance à Jérusalem, qui est la BETH EL par excellence, la Porte du Ciel !!!

Et Jacob de faire ce qu’il doit quand on rencontre DIEU dans un Lieu, dans Le LIEU : il élève une stèle, comme un autel, et il offre un sacrifice. Mais cette pierre est plus qu’un simple autel : elle est la pierre de fondation de toute la famille d’Israël, dira le Zohar. Une pierre qui soutient la fondation du Monde !!! La pierre qui deviendra la Pierre angulaire qu’est le Christ pour saint Paul.

Là encore, chose étrange : Ce DIEU qu’il ne connaît pas, il le reconnaît quand même comme celui d’Abraham. Le texte lui donne le nom du Tétragramme Sacré, mais c’est une anticipation.

Et il fait un vœu conditionnel : si ce DIEU me protège, il sera mon DIEU… Lire v. 20-22.

Vous voyez ? Il veut garder la main. C’est un marchandage avec le DIEU des Pères !!! Mais en même temps, Jacob veut lui-même faire le choix de ce DIEU, pas seulement le recevoir comme un Big-Mac déjà emballé et prémâché. C’est tout à son honneur, mais en même temps, Jacob reste un roublard. C’est presque un chantage !!!

Sauf que ce ne sera pas tout rose avec ce DIEU là !

Après cet épisode très fort, Jacob ne connaîtra que très peu d’étapes heureuse. Au point qu’au moment de mourir, il dira : « Courts et mauvais ont été les jours de ma vie ! » « Courts »… pas tant que ça : il aura 130 ans quand il dira ça. Mais enfin, c’est moins que ses pères, alors il trouve que c’est un peu court !!! De toute façon, même si nous vivions 300 ans, au moment de mourir, on trouverait toujours ça trop court. L’homme est ainsi fait qu’il aime la vie, même quand elle est dure.

En tout cas, il dit quelque chose de très juste : il a voulu l’élection et il l’a eue, mais la vie de l’Élu n’est pas drôle. Le Christ en fera la difficile expérience.

Mais enfin, pour l’heure, ayant fait un marché avec son DIEU, Jacob reprend la route et s’en va droit vers la terre des fils de l’Orient. Et là, il rencontrera l’amour de sa vie, mais ce sera pour la prochaine fois.

Je vous remercie.