22-06-2022

[Dt] Répondre à l'Appel de YHWH

Deuteronomy 10:1-22 par : Père Alain Dumont
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Voilà que Moïse taille de nouvelles pierres sur lesquelles YHWH va écrire le Décalogue, mais attention : que ces pierres ne deviennent pas à leur tour des idoles ! Ce sont des Paroles qu’il faut inscrire sur les tables du cœur, et non des pierres à adorer ! Dix Paroles qui résonnent comme un Appel d’Être, un appel à être, à vivre…
Transcription du texte de la vidéo : 
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Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article
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Bonjour,

Nous ouvrons aujourd’hui le ch. 10 du Deutéronome qui constitue la réponse MISÉRICORDIEUSE de YHWH à l’intercession de Moïse qu’on a évoquée à propos du ch. précédent. Il est essentiel de comprendre l’importance de cette intercession qui veut que, même si tout le peuple, si TOUT YiSseRâ‘éL se détourne de YHWH, il suffit d’UN SEUL juste pour que YHWH ne détruise pas ce peuple qui pourtant, en toute justice, l’aurait mérité. Rappelons-nous Sodome et Gomorrhe : ‘AVeRâHâM avait marchandé avec YHWH et n’était pas allé au-dessous de 10 justes nécessaires pour intercéder en faveur de ces villes de GoYîM. Ici, concernant Israël, un seul juste suffit pour intercéder en la personne de son Serviteur Moïse.

Ceci dit, réfléchissons sur la question de la MISÉRICORDE. La MISÉRICORDE ne signifie pas que הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא

HaQQâDOSh BaROuKh HOu‘, le Saint Béni soit-Il, un autre nom de YHWH, pour varier un peu — La MISÉRICORDE ne signifie pas, donc, que HaQQâDOSh BaROuKh HOu‘ serait une simple « bonne pâte » qui passerait à son peuple tous ses caprices ! Ce serait proprement injuste, dans la mesure où le propre du caprice est d’entraîner des conséquences néfastes, que ce soit sur les hommes ou plus largement dans le monde. Donc admettons que sous prétexte de bonté, YHWH pardonne les caprices : et les victimes, on en fait quoi ? Or c’est précisément ça qui agace YHWH ! Il ne s’agit pas pour Lui de se faire obéir pour se faire obéir, ou de faire comme si rien ne s’était passé. Ça s’est passé ! Et ça n’a pas passé, puisque les conséquences sont désastreuses et qu’il y a eu des victimes collatérales. Donc pas question d’oublier ! Mais vu les enjeux, pas question non plus de tout condamner sur un coup de tête… Alors quoi ? Alors la vision de HaQQâDOSh BaROuKh HOu‘ est celle-ci : tant que UN juste intercédera en faveur de YiSseRâ‘éL, rien ne sera jamais perdu. En revanche, quand il n’y aura plus de juste, « pas même un seul » comme s’effraye le Ps 14 ; alors le comble du mal sera atteint et la justice stricte fera son office. Enfin bref. Toujours est-il que Moïse tient sa place : il intercède pour qu’advienne la MISÉRICORDE de YHWH en faveur de YiSseRâ’éL.

Pour en revenir aux v. 1 à 5, YHWH répond donc à l’intercession de Moïse en lui donnant de tailler cette fois lui-même les deux tables de pierre qui remplaceront celles qui viennent d’être brisées. Ici, le texte reprend Ex 34,1-4, en ajoutant néanmoins l’ordre de faire une arche de bois ; alors que dans le livre de l’Exode, l’arche était déjà dans les cartons dès le ch. 25. Je ne reviens pas sur ce qu’on a déjà dit à propos de ces tables au chapitre précédent dans la dernière vidéo, mais retenons à tout le moins que ces nouvelles Tables, en plus d’être le support d’une Parole divine — c’est tout de même YHWH qui écrit, redit le v. 4 —, sont désormais aussi la marque de la MISÉRICORDE de HaQQâDOSh BaROuKh HOu‘, le Saint Béni soit-Il ; puisqu’elles sont le fruit de l’intercession de Moïse. Grâce à lui, malgré la faute du peuple, l’héritage est maintenu comme tel, signe que l’Alliance n’a pas été dénoncée par YHWH.

Le v. 6 évoque pour sa part la mort de ‘AHaRoN, le frère aîné de Moïse dans la tradition biblique ; mais bon, on l’a dit à propos du ch. 9 au v. 20 : autant il avait une importance majeure dans les livres de l’Exode du Lévitique et des Nombres, autant ici, il est réduit à la portion congrue : au ch. 9, YHWH est en colère contre lui, et ici, il meurt. Point final. C’est assez court, et ça révèle assez bien que l’inspiration deutéronomiste est une tradition opposée à celle qui met ‘AHaRoN en exergue, c’est-à-dire la tradition sacerdotale. Elle reste peu présente dans le Deutéronome pour qui ‘AHaRoN reste une figure secondaire. Non que le sacerdoce soit rejeté, puisque les fils de Lévi sont convoqués pour servir le culte de l’Arche. Mais la lignée de ‘AHaRoN est à tout le moins suspecte : c’est tout de même lui qui a présidé à la confection du Taurillon d’Or et qui a suscité la colère de YHWH contre le peuple ! Ce qui veut dire que dès la TORâH voyez, on veut bien que YHWH institue un sacerdoce, mais en même temps, on en dit d’emblée les limites : il suffit que Moïse sorte des mémoires avec le temps, et c’est en fini de l’orthodoxie ! Les prêtres prennent le pouvoir et mettent le peuple sous l’obédience d’une idole ! Ce sont les grands reproches que leur feront les prophètes comme Michée ou Jérémie, entre autres. Écoutons Michée : « Écoutez donc ceci, chefs de la maison de Jacob, dirigeants de la maison de YiSseRâ‘éL, vous qui avez la justice en abomination, qui tordez tout ce qui est droit, bâtissant Sion dans le sang et YeROuShâLaYiM dans la perfidie ! Ses chefs jugent pour un cadeau, ses prêtres enseignent pour un salaire, ses prophètes pratiquent la divination pour de l’argent. Et ils s’appuient sur le Seigneur en disant : “Le Seigneur n’est-il pas au milieu de nous ? Aucun malheur ne peut nous atteindre !” — le fameux : « Gott mit uns ! » — C’est pourquoi, à cause de vous, Sion sera un champ qu’on laboure, YeROuShâLaYiM, un monceau de décombres, et la montagne du Temple, des lieux sacrés envahis par la forêt. » (Mi 3,9-12) ;

« Ainsi parle YHWH TseVâ’OT — le Seigneur rassembleur —, le ‘ÈLoHîM d’YiSseRâ‘éL : “Ajoutez donc vos holocaustes à vos sacrifices et mangez-en la viande, mais le jour où Je les ai fait sortir du sol de MiTseRaYîM, Je n’ai pas parlé ni commandé de paroles à vos pères à propos de l’holocauste et du sacrifice. Voici la parole que Je leur ai commandée : ‘Écoutez Ma voix : je serai votre ‘ÈLoHîM, et vous, vous serez Mon peuple ; vous suivrez la totalité du chemin que Je vous commande pour votre bien.’ Mais ils n’ont pas écouté, ils n’ont pas tendu l’oreille, ils ont marché suivant leurs conseils, suivant l'entêtement de leur cœur mauvais ; ils ont tourné le dos et n’ont pas été en face. Depuis le jour où vos pères sont sortis du sol de MiTseRaYîM jusqu’à ce jour, j’ai envoyé vers vous tous mes serviteurs, les prophètes, envoyés au lever du jour. Mais ils ne m’ont pas écouté, ils n’ont pas tendu l’oreille, ils ont raidi leur nuque, ils ont fait le mal plus que leurs pères.” Tu leur parleras avec toutes ces paroles mais ils ne t’écouteront pas. Tu les proclameras vers eux mais ils ne te répondront pas. Alors, tu leur parleras ainsi : “Voilà la nation qui n’a pas écouté la voix de YHWH son ‘ÈLoHîM et n’a pas accepté la leçon ! La fidélité s’est perdue, elle a été retranchée de leur bouche. » (Jr 7,21-28). Je vous rappelle que Jérémie est l’un des inspirateurs principaux de la pensée deutéronomiste.

Donc voilà. Et c’est vrai qu’en définitive, le sacerdoce en YiSseRâ‘éL a marché cahin-caha, un peu comme la royauté du reste ! Ils ont tous les deux eu leurs bons moments, mais l’Exil a clairement montré qu’ils ont manqué l’appel de HaQQâDOSh BaROuKh HOu‘… Raison pour laquelle d’ailleurs l’auteur deutéronomiste n’aime guère ces deux institutions qui, pour lui, ont trahi la TORâH et sont au principe de la déportation du peuple. Seule subsiste la prophétie — la vraie, évidemment, parce que là encore, YiSseRâ‘éL a eu son lot de faux prophètes, mais la tradition refuse de faire mémoire, et elle a raison. Les vrais prophètes se reconnaissent à ce qu’ils ne se sont pas détournés de leur mission et qu’ils ont été des ressources infiniment précieuses pour le relèvement de YiSseRâ‘éL. Et en définitive, c’est tout ce qui compte.

Quoi qu’il en soit, à l’époque du Christ, sacerdoce et royauté seront tous les deux en crise, ça n’est rien de le dire ! Raison pour laquelle, en Jésus, reconnaissent les Chrétiens, ces deux institutions ne sont pas éradiquées mais renouvelées : d’une part par le dernier roi de la généalogie de Juda — c’est ce que nous dit Matthieu : si Jésus est roi, ça n’est pas seulement spirituel — ; d’autre part par le véritable Grand-Prêtre, dira l’épître aux Hébreux qui présente Jésus comme le Grand Prêtre véritable de l’Alliance Renouvelée par le sacrifice de son propre corps et de son propre sang sur l’autel de la Croix. De ce point de vue, Jésus s’inscrit bel et bien dans la ligne du Moïse deutéronomique dont il porte la TORâH à son accomplissement. Rappelons-nous : « Ne décrétez pas que je suis venu jeter à terre la TORâH ou les prophètes ! Je ne suis pas venu jeter à terre mais porter à la plénitude. Amen, je vous parle ainsi : jusqu’à ce que passent le ciel et la terre, pas un seul YOD, pas un seul tiret de la TORâH ne passera d’ici à ce que tout soit advenu. Donc celui qui rejette un seul de ces commandements, [ne serait-ce que] le moindre [d’entre eux], et enseigne ainsi aux hommes, sera appelé moindre dans le Règne des cieux. Cependant, celui qui les fait et les enseigne, celui-ci sera appelé grand dans le Règne des cieux. » (Mt 5,17-19).

Alors si on en revient à notre texte, les v. 8 et 9 entérinent quant à eux l’institution des LeWiYîM, et là pour le coup, on est dans le droit fil de YeH.èZeQé‘èL — Ézéchiel —. Je vous renvoie à ce qu’on en a dit à propos du ch. 1 du livre des Nombres. Le Deutéronome entérine sans difficulté leur mission de service et de bénédiction, et l’institution se pérennisera puisqu’on les retrouvera officiant fidèlement dans le Temple jusqu’à l’époque du Christ, donc jusqu’à la destruction du Temple d’Hérode en 70.

Et hop, aux v. 10-11, on retrouve les 40 jours et les 40 nuits d’intercession de Moïse — je n’y reviens pas —. Le rédacteur aurait pu les reprendre dès le v. 29 du chapitre précédent, mais assez logiquement : si on ne veut pas que la seconde version des pierres soit elle-même suspecte d’idolâtrie, il ne fallait pas que l’intercession intervienne avant, mais bien après qu’elles aient été refaites !

« Et maintenant », dit le v. 12 — We“aTtâH en hébreux, une expression qu’on trouve souvent chez les prophètes, qu’on entend souvent dans la TORâH et que reprendra saint Paul : c’est une expression prophétique qui traduit le moment déterminant d’un oracle où YHWH reprend les choses en main et recadre les affaires. Är ailleurs, on peut lire les v. 12-13 comme une très belle définition de la CRAINTE de YHWH, qui ne réside définitivement pas dans la peur à son encontre, mais dans le fait de marcher sur ses chemins, dans cet amour de charité qui consiste à refuser de mettre la main sur YHWH en n’en faisant qu’à sa tête comme les ch. précédents viennent de l’évoquer ; un amour de charité qui consiste avant tout à servir YHWH en écoutant ses commandements de tout son cœur — la volonté — et de toute sa « gorge », c’est-à-dire sa vie, son âme, de tout son être ; dit autrement, viscéralement, passionnément et sans compromis. Je vous renvoie à ce qu’on a déjà dit à propos du ch. 6. Comme le dit Saadia Gaon, un grand penseur juif espagnol du xe siècle : « Quand un homme contemple les œuvres merveilleuses et immenses de la Création de YHWH et admire Sa sagesse infinie, sans pareille à l’échelle humaine, il aimera YHWH aussitôt, Le glorifiera et Le célèbrera en éprouvant la nostalgie de YHWH comme le chantait David : « Mon âme — mon être, ma vie — a soif de YHWH ! » (Ps 42(41),3). » On trouve ce propos dans Le Guide des Égarés de Maïmonide au ch. xii, qui écrit, lui, deux siècles plus tard.

Dit autrement, à ce stade de notre lecture, la CRAINTE s’avère être cette secousse d’être qu’on éprouve devant le Mystère, parce que quelque part, ÇA PARLE ! Ça nous parle, et ça nous ébranle au plus profond de l’être parce que ça signifie que QUELQU’UN APPELLE ! Quelqu’un appelle à une rencontre, une ALLIANCE, qui va peu à peu se révéler comme un appel à la COMMUNION. Du coup, on ne peut pas seulement résumer la crainte au respect : le respect tient à distance, alors que la CRAINTE, elle, relève de la RÉPONSE à cet appel qui nous précède et dans la considération de la LIBERTÉ inaliénable de l’ÊTRE qui appelle. La Bible entend son Nom : “aNî YHWH, je suis l’ÊTRE, c’est-à-dire « Je suis celui qui appelle à Être », qui instaure donc un ENTRE-DEUX qui met en mouvement un autre que Lui et, ce faisant, l’amène à l’existence, le plonge dans le TEMPS, ce qui fait qu’à partir du moment où cet appel résonne, une Création commence ; elle commence à avoir du poids, à compter ; or précisément, créer, à en croire le ch. 1 de la Genèse, ça consiste à COMPTER : « Jour UN, deuxième Jour, troisième Jour, etc. ». Seulement il y a un corolaire : cette réalité créée n’existe que si elle RÉPOND à l’appel qui lui est lancé, et c’est l’homme, ‘âDâM, qui est chargé de la réponse. Et du fait que la parole lui soit confiée, à lui, de la part de YHWH en vue d’assurer une réponse à son Appel, c’est là qu’on reconnaît que ÂDâM est la seule créature qui soit vraiment créée à l’image et à la ressemblance de YHWH, de l’ÊTRE qui fait être… Parce que ÂDâM parle, comme HaQQâDOSh BaROuKh HOu‘. Et parlant, non seulement il répond — là on est vraiment au fondement de toute parole —, mais il fait ÊTRE à son tour, toujours par cette parole dont il est doué et qu’il adresse aux autres ; aux autres qui lui sont confiés d’une manière ou d’une autre. Tout ça c’est très concret ! Comme quoi décidément, la Bible, ça n’est pas seulement un bloc d’historiettes et de commandements gratuits ! C’est un écrit INSPIRÉ, qui porte une PAROLE VIVANTE qui FAIT VIVRE ! Une parole qui est celle de YHWH et de l’homme, dans un jeu, dans un ENTRE-DEUX incessant où n’émerge rien de moins que la VIE…

Donc la CRAINTE, pour revenir à elle, n’est jamais en définitive que le CONSENTEMENT à ce que notre parole d’homme — qui est déjà un partage divin incommensurable ! — ne subsiste, en son fond, QUE comme RÉPONSE ! Et ça c’est TRÈS DIFFICILE à admettre pour un être qui est hanté par la convoitise ; qui veut être premier en tout, sans rien devoir à personne ; qui veut, comme disait Jean-Paul Sartres, que son existence précède son essence !!! Mais non, dit la Bible : l’homme est un être de RÉPONSE, non seulement en son nom propre, mais au nom de toute la création ! Allez, encore une fois pour que ça rentre : « La Création est à l’affût du dévoilement des fils de Dieu qu’elle attend depuis des lustres ! » (Rm 8,19). Donc la CRAINTE, en définitive, c’est la conscience de ne pas être premier, mais en même temps la conscience de la mission essentielle dont l’homme est revêtu en tant qu’image de YHWH au sein même de la Création ! Une mission qui consiste à FAIRE ÊTRE, à AMENER À L’ÊTRE ce qui n’est encore qu’en POTENTIEL D’ÊTRE.

Ça c’est vraiment très difficile pour l’homme ! Ne pas avoir la main, ne pas pouvoir ne serait-ce que revendiquer cet appel initial… Admettre que l’Être créateur est fondamentalement et inaliénablement LIBRE de toute convoitise humaine ! Ce qui l’oblige à comprendre que cette liberté, que TOUTE liberté, y compris celle de ‘ÂDâM, est donnée non pas pour se préserver de l’autre, mais pour se donner à l’autre au contraire ; ou plus exactement pour se PARTAGER à l’autre — divin ou humain — en vérité ! Dit autrement, la liberté est faite pour pouvoir se LIVRER en HÉRITAGE d’ÊTRE ; un héritage sur lequel, au nom de la Création tout entière, ‘ÂDâM est chargé de veiller en répondant de cet Héritage devant YHWH et devant ses frères, mais aussi devant ses pères qui l’ont précédé, et ses fils à qui il va léguer l’héritage — qui est d’abord un héritage de PAROLE, il faut vraiment y insister. Répondre de cet héritage, ça signifie lui faire porter ses fruits. Si on enlève cette dimension de RÉPONSE, on tombe dans l’exploitation pure et simple, à la convoitise qui refuse de rendre des comptes à qui que ce soit d’autre qu’à soi ! Et c’est pour ça que RÉPONDRE — ce qui est le nerf de la vie spirituelle —, ça met du mouvement, ça secoue ; parce que comme le disent les v. 14-15, ça fait d’abord aller de YHWH vers YiSseRâ‘éL et de YiSseRâ‘éL vers YHWH, de sorte qu’entre eux deux naisse peu à peu une AMITIÉ vivante, vivifiante dont YHWH est le garant, par l’Alliance ! Et là, on touche du doigt le BIEN vers lequel dirige le chemin prescrit par YHWH, comme dit la fin du v. 13.

Les v. 14-15 par ailleurs, reprennent le thème du ch. 7 au v. 7 : « YHWH s’est épris de vous et vous a élus — non que vous soyez nombreux parmi tous les peuples, car vous êtes le moindre de tous les peuples — C’est parce que YHWH vous aime et garde le serment qu’il a juré à vos pères » (Dt 7,7), avec cette précision de nos versets : YHWH s’est épris DES PÈRES — entendons par là ‘AVeRâHâM, YTseRâQ et Ya”aQoV, comme déjà en Dt 9, v. 5 et 27 entre autres — ; et c’est en vertu de cette fidélité sans retour envers LES PÈRES qu’Il a choisis, qu’Il a élus, que YHWH garde sa fidélité à un YiSseRâ‘éL qui lui, s’est illustré par son infidélité. Mais un peuple infidèle que HaQQâDOSh BaROuKh HOu‘, dans sa MISÉRICORDE, relance dans l’ÊTRE ! Qu’Il continue d’APPELER, comme si la fidélité des Patriarches tenait lieu d’intercession ; une intercession dont Moïse serait le relais nécessaire, puisque l’homme est ainsi fait qu’il lui faut toujours une figure de proue pour pouvoir avancer. Et c’est par cet ENTRE-DEUX qui oscille non seulement de YHWH à l’homme et de l’homme à YHWH, mais aussi d’un homme à l’autre à l’intérieur de la même génération comme entre les générations, que la Bible témoigne de la puissance de cette VIE qui nous relie dynamiquement les uns aux autres : on n’est rien sans les pères, et nos fils ne sont rien sans nous. Par ailleurs, quand une génération se distingue par sa fidélité, elle fait honneur aux pères, et va même jusqu’à intercéder en faveur de ceux d’entre eux qui n’auraient pas vraiment tenu leur place… C’est ce que les chrétiens nomment la COMMUNION DES SAINTS.

Le v. 16, quant à lui, est un peu surprenant à première vue, en tout cas dans la TORâH. Il parle de la circoncision du cœur si chère au prophète Jérémie — encore lui : « Circoncisez-vous pour YHWH, ôtez le prépuce de votre cœur, hommes de YeHOuDâH, habitants de YeROuShâLaYiM ! » (Jr 4,4) Ce qui ne signifie pas que Jérémie, ou notre rédacteur deutéronomiste, méprisent pour autant la circoncision corporelle : ok donc pour circoncire le corps, mais attention : dès la TORâH, c’est-à-dire au principe de cette pratique, c’est la circoncision du CŒUR qui est visée ; autrement dit : la circoncision du corps n’a de sens que comme SIGNE d’une circoncision intérieure, qui est la circoncision véritable qu’appelle YHWH de ses vœux ; et là voyez, on touche vraiment la dimension CHARNELLE qui fait que le corps en lui-même, pris pour lui-même, opaque à toute dimension spirituelle, n’est jamais que de la matière : un squelette mis en mouvement par différents systèmes, physiologiques… Tout ça est utile, on est d’accord ! Ne serait-ce que quand il faut réparer, c’est bien sur la matière du corps qu’on travaille — Mais une fois qu’on a dit ça, est-ce qu’on a tout dit de l’homme ? Eh bien la Bible nous dit que non. Elle nous dit que le corps est fait pour être traversé par l’ÊTRE ; le corps est fait pour écouter la voix de l’ÊTRE et lui répondre. Et c’est cette aptitude à répondre qui lui permet de se découvrir non pas seulement comme un pur système biochimique mais comme CHAIR. Une CHAIR qui a un CŒUR, non pas au sens physiologique évidemment, ni même au sens contemporain de sensibilité, mais au sens de la VOLONTÉ, de la DÉTERMINATION à répondre. Circoncire le cœur, c’est circoncire la VOLONTÉ pour qu’elle ne se laisse pas aller à la folie de la toute-puissance. Parce qu’alors là, on retombe dans le péché du Taurillon d’Or ; on retombe dans cette prétention meurtrière à vouloir se faire Dieu à la place de Dieu, ou plus subtilement à décider par soi qui doit être Dieu pour convenir aux revendications de l’homme maladivement rivé sur son narcissisme.

Du coup, de l’intérieur de cette circoncision du cœur jaillit alors une hymne qui va nous entraîner jusqu’à la fin du chapitre. Alors on retrouve la même articulation entre les v. 17 et 18 qu’entre les v. 14 et 15 : la transcendance divine reste charnellement attachée aux plus petits ! Pourquoi ? Parce que le petit, c’est celui qui a viscéralement besoin qu’on lui parle pour exister… qui a viscéralement besoin de répondre, là où le riche, lui, croit qu’il n’a de compte à rendre à personne d’autre que lui-même. Et de la même manière que les v. 14-15 étaient suivis d’un commandement, à son tour pour le v. 19 : d’un côté, un  commandement tourné vers YHWH : « Circoncisez le prépuce de votre cœur ! » (Dt 10,16) ; et de l’autre vers les petits : « Aimez de charité le résident ! » (Dt 10,19), c’est-à-dire mettez-vous au service de celui qui n’est pas comme vous mais qui réside au milieu de vous et qui a besoin de la parole vivifiante dont vous avez la garde au nom de YHWH.

Alors poursuivons : le v. 20 reprend le v. 12, l’un et l’autre se rattachant au commandement de la charité. Et là, ne passons pas trop vite sur le thème de l’attachement, du lien, qui appartient au vocabulaire nuptial : « C’est pourquoi l’homme quitte son père et sa mère et SE LIE à sa femme, et ils deviennent une seule chair. » (Gn 2,24), c’est le même verbe, somme toute assez rare dans la Bible ; donc il faut le prendre ici au sérieux. Du coup, quand on entend : « C’est YHWH, ton ‘ÈLoHîM, que tu craindras, Lui que tu serviras, Lui à qui tu te lieras… » (Dt 10,20), forcément le verset prend un certain relief, qui répond à l’affirmation de YHWH : « Je me suis épris de tes pères et de toi ! » d’après le v. 15 ! C’est quasiment le Cantique des Cantiques qui appelle YiSseRâ‘éL aux Noces avec son DIEU ! Des Noces qui, d’un point de vue chrétien, s’accomplissent dans la Personne de Jésus en qui sont unis nuptialement le Verbe de YHWH et la nature humaine, pour ne faire, précisément, qu’une seule CHAIR. En la personne du Verbe Incarné, du Christ Jésus, YHWH et l’homme sont désormais inaliénablement ATTACHÉS, LIÉS l’un à l’autre. Et ma foi, ce v. 20 se présente comme la première ouverture à cette bouleversante rencontre qui allie indéfectiblement YiSseRâ‘éL au Nom de YHWH, et que Jésus mènera jusqu’à son accomplissement.

Du coup, une telle perspective ne peut que faire entrer dans la louange des v. 21-22, qui à leur tour articulent la dimension cosmique, universelle, et la dimension particulière. Là, on est dans le même ton que le cantique de Marie : « YHWH fit pour moi des merveilles, Saint est son Nom ! ».

Voilà. Alors on pourrait dire beaucoup d’autres choses concernant ce chapitre, mais bon. Si déjà on intègre tout ça pour le mettre en œuvre dans la foi, ce ne sera déjà pas si mal. Je vous souhaite donc une lecture féconde de ce chapitre.

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Nous verrons la suite la prochaine fois. Je vous remercie.
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